Salon de l'agriculture : "Venez investir au Maroc, on pourra travailler tous ensemble", affirme Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l'Agriculture
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Le Maroc est invité d'honneur du Salon de l'agriculture pour cette édition 2025. Occasion de mettre les richesses et les ressources du pays à l'honneur, alors que les spécialités locales garnissent un stand richement décoré : thé à la menthe bien sûr, pâtisseries au miel, mais aussi fruits et légumes. Des fruits et légumes qui sont par ailleurs l'objet de discordes au salon, alors que nombre d'agriculteurs français dénoncent la concurrence déloyale des maraîchers marocains.
Si Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l'Agriculture, se dit "très bien accueilli par les visiteurs et les professionnels", il défend les agriculteurs marocains, accusés de ne pas respecter les clauses d'un accord signé il y a 25 ans entre l'Europe et la France.
franceinfo : Cet accord prévoit notamment un échange tomate contre céréale, alors que la France est déficitaire en la matière et que la demande ne cesse d'augmenter. La France prend le relais l'été avec les céréales, puisqu'il fait trop chaud au Maroc. La ministre de l'Agriculture française, Annie Genevard, considère pour sa part que la saisonnalité n'est plus respectée.
Rachid Benali : À ma connaissance, il n'y a pas de saisonnalité dans l'accord. Il y a des échanges et un accord qui prévoit qu'à partir d'un certain tonnage il y a des droits de douane qui s'appliquent pour les productions, et comme pour n'importe quel pays. Aucun accord, ni aucune autre décision ne bloquent l'exportation de tomates, tout comme aucun accord ne bloque les importations de blé que nous réalisons toute l'année. Je pense qu'on a trop focalisé sur la tomate. Il y a d'autres échanges entre la France et le Maroc.
"Nous sommes très heureux d'avoir repris des échanges avec la France ; des échanges au niveau politique, et diplomatique, et cette relation est très bénéfique pour tout le monde."
Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l'Agriculturefranceinfo
À l’origine, cet accord concernait la tomate qu'on pourrait dire "classique". Or, il y a un problème au niveau de la tomate cerise, puisque les exportations de tomates cerises marocaines vers l'Europe, via la France, ont été multipliées par deux et demi depuis 2018, soit environ 150 000 tonnes chaque année. Vous répondez quoi aux personnes qui estiment que vous vous exportez trop de tomates cerises vers l'Europe ?
C'est vrai qu'on a multiplié ces exportations par deux et demi. Mais on pourrait dire la même chose au niveau des importations de blé. Le Maroc continue à être demandeur, et demandeur d'autres produits, avec derrière l'enjeu du réchauffement climatique. En France, que ce soit pour le lait ou la viande, vous avez un potentiel énorme. C'est un potentiel dont on doit profiter. L'enjeu désormais, c'est de réellement développer les échanges.
Pour revenir sur la tomate : la France et le Maroc ont annoncé la reprise du Comité tomate, un comité qui a été mis en sommeil depuis 2020, et qui réunit les filières françaises et marocaines. Vous en attendez quoi ? Un nouvel accord ?
Non, pas de changement d'accord. Le comité va simplement se réunir pour prendre des décisions, mettre en œuvre les procédures habituelles, mais il n'y a pas de renégociations d'accords prévues, loin de là. Ce sont simplement des discussions qui vont permettre de mieux formaliser les échanges et les partenariats.
Le syndicat le plus virulent à votre encontre est la Coordination rurale. On se souvient des manifestations en 2024 dans le Sud-Ouest contre les tomates marocaines. Un syndicat qui a pris de l'ampleur lors des dernières élections professionnelles : estimez-vous que vous êtes encore les bienvenus en France ? Craignez-vous pour l'avenir ?
Pas du tout. Je vois l'avenir en rose. Il y a un potentiel énorme, et des changements climatiques qui nous touchent tous. Ces changements climatiques, nous devons les transformer en plus et non pas en moins. Parce qu'on parle de la tomate aujourd'hui, mais si nous avons certes des conditions climatiques qui nous permettent d'avoir de meilleurs rendements au niveau de sa production, du côté de la France, c'est la même chose avec le blé encore une fois.
"Aujourd'hui en France, on produit du blé à moins de 200 euros la tonne, alors qu'au Maroc, on ne peut pas produire à moins de 300 ou 350 euros la tonne. Ce n'est pas pour autant qu'on va stigmatiser le blé français."
Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l'Agriculturefranceinfo
Le Maroc a besoin de la France, la France du Maroc, on l'a bien compris. La sécheresse, vous en souffrez ? Est-ce que vous parviendrez à produire autant demain qu'aujourd'hui ?
On parviendra et on y arrivera parce qu'on a tout ce qu'il faut. On travaille à une agriculture durable et une énergie propre. C'est ce que je dis aux agriculteurs : venez investir au Maroc, on pourra travailler tous ensemble. On doit vraiment partager avec les Français.
Francetvinfo